L’enfer
S’extirper de la poisse les yeux remplis de sable
Descendre de sa couche s’avachir sur la table
Se remplir le cerveau d’un pauvre robusta
S’aigrir de pain rassis grignotant tel un rat
Se couvrir de frusques aux doux relents de crasse
L’aurore est encore loin il faut que l’automne passe
S’extraire d’une maison aux allures de taudis
Sur un chemin de planches tâtonner sans esprit
La tête déjà vide du sommeil d’un robot
S’emplir de désespoir d’hurlements de cabot
Naviguer dans l’épave pleine d’humidité
Sur une mer sans espoir qui mène aux abattoirs
Apercevoir enfin dans le brouillard qui pleure
De puissants projecteurs ces amers de malheur
Egayant les parkings réservés visiteurs
S’y garer tout au fond sous les arbres qui meurent
S’engoncer de froideur sous l’œil des portiers
Et sous les néons brusques immoler tout espoir
Et c’est soudain l’odeur de bottes et de pieds
Tenues blanches et calottes d’une noire pureté
Casques rouges aux kapos et blancs pour les esclaves
Découper au couteau dans une froideur de cave
Des carcasses alignées de dindes écervelées
Se dire qu’on est machine que les heures vont passer
Et se prendre à rêver de vacances en enfer